March 18, 2021

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Nous dont la lampe, le matin,

Au clairon du coq se rallume,

Nous tous qu'un salaire incertain

Ramène avant l'aube à l'enclume,

Nous qui, des bras, des pieds, des mains,

De tout notre corps luttons sans cesse,

Sans abriter nos lendemains

Contre le froid et la vieillesse.


Aimons-nous, et quand nous pouvons

Nous unir pour boire à la ronde

Que le canon se taise ou gronde

Buvons ! Buvons ! Buvons !

A l'indépendance du monde !


Quel fruit tirons-nous des labeurs

Qui courbent nos maigres échines ?

Où vont les flots de nos sueurs ?

Nous ne sommes que des machines.

Nos Babels montent jusqu'au ciel,

La terre nous doit ces merveilles :

Dès qu'elles ont fini le miel,

Le maître chasse les abeilles.


Aimons-nous, et quand nous pouvons

Nous unir pour boire à la ronde

Que le canon se taise ou gronde

Buvons ! Buvons ! Buvons !

A l'indépendance du monde !


A chaque fois que par torrents

Notre sang coule sur le monde,

C'est toujours pour quelque tyran

Que cette rosée est féconde.

Ménageons-le dorénavant,

L'amour est plus fort que la guerre ;

En attendant qu'un meilleur vent

Souffle du ciel ou de la terre.


Aimons-nous, et quand nous pouvons

Nous unir pour boire à la ronde

Que le canon se taise ou gronde

Buvons ! Buvons ! Buvons !

A l'indépendance du monde !

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