November 26, 2015

Syrie: la dissidence française II


Lien: France Inter
Transcription de l'émission

L'enquête - Le pétrole à l'origine du monstre Daech  

Lors du renversement de Saddam Hussein, le golfe persique est déstabilisé. Dans un terreau alimenté par la déliquescence de l’État Irakien, une corruption endémique, et une haine profonde des Chiites et des Occidentaux, l’Arabie Saoudite et le Qatar – dont les intérêts divergent par ailleurs - voient d’un très mauvais œil l’apparition d’un croissant chiite aux frontières de leurs pays sunnites. Ils accueillent donc favorablement le développement des groupes djihadistes sunnites.
De cette jungle émergeront des groupes djihadistes dont il existe aujourd’hui deux principales composantes : Al Nosra, et l’État Islamique.

Des enjeux économiques se superposent à ces dimensions politiques, sociales et religieuses.
En 2010, l’Iran projette de construire un pipeline qui passerait par l’Irak et par la Syrie pour acheminer du pétrole et du gaz vers la Méditerranée. Ce qui redistribuerait les cartes de la production pétrolière dans le Golfe. Or, le gaz pour le Qatar, et le pétrole pour l’Arabie Saoudite, c’est vital.
À partir de là, le Qatar et l'Arabie Saoudite se mettent à financer les mouvements djihadistes. Ils contribuent donc à la montée en puissance de Daech, même si les circuits financiers sont difficiles à établir…
►►►► L' enquête complète de Benoît Collombat et de Jacques Monin, à réécouter et à lire ici

La déradicalisation en prison Après les attentats de Charlie Hebdo, on avait souligné que les frères Kouachi s'étaient radicalisés en prison, et qu'il fallait donc doter les maisons d’arrêt de moyens importants. Où en est-on un an après ?


Il n’y a, à notre connaissance, qu’une seule et unique expérience menée par le ministère de la justice dans deux prisons : celle de Fleury-Mérogis ainsi que celle d'Osny dans le Val-d'Oise.
Cette prise en charge des détenus est menée par l'Association "Dialogue Citoyens". Elle a été imaginée en 2014 et lancée au mois de février 2015, après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher. Soixante prisonniers en ont déjà bénéficié.


►►►►L'enquête complète de Laetitia Saavedra, à retrouver ici

Daech : la fabrique des « kamikazes »

Le Vendredi 13 novembre 2015, la France connaît pour la première fois des attentats suicide sur son sol. Ce type d’action était pourtant redouté par les autorités depuis plusieurs mois.
En juin dernier, un rapport parlementaire sur la surveillance des filières djihadistes décrivait « le fait que les terroristes, du fait de leur endoctrinement, ont la volonté de mourir» comme une évolution marquante
Toujours selon ce rapport, « ce terrorisme sans retour implique des actions suicides contre lesquelles il est particulièrement difficile de lutter ».

Les experts le savent, ,il y a une banalisation de l’utilisation des ceintures explosives dans les rangs de Daech. L’État islamique a même, dès le début de la guerre en Syrie, « conceptualisé » ce type d’opération avec un terme qui désigne un « candidat au martyr », qui, arme à la main, se rapproche de la foule ou d’une cible et déclenche sa ceinture d’explosifs, soit parce qu’il est encerclé, soit parce qu’il n’a plus de munition.
C'est donc depuis la Syrie que Daech aurait exporté ce type d’opération suicide en France, avec, on l’a constaté, des terroristes très préparés et extrêmement bien organisés.
Plusieurs commandos ont été recrutés pour ces attaques. Il y avait au moins sept candidats au suicide dans ces groupes.
  • Des « listes d’attente » de candidats :
L’organisation Daech s’en vante : dans ses rangs, les djihadistes, qu’ils viennent d’Europe ou du monde arabe, se bousculent au portillon pour mourir en martyrs.
Le chercheur Romain Caillet, spécialiste des mouvements djihadistes, explique :
Ce n’est pas de la propagande, c’est une réalité. En Syrie et en Irak, il y a des listes d’attente de gens qui sont prêts à faire des opérations suicides ! Ce sont, aussi bien, des jeunes de quartiers sensibles en France que des gens de bonne famille, aussi bien des personnes fortunées des pays du Golfe que des jeunes issus des quartiers déshérités de Tunisie.
Si les origines et les profils de ces candidats aux attaques suicides sont variés, ces djihadistes sont tous volontaires. Comme l’explique David Thomson, journaliste de RFI, également auteur de Les Français jihadistes (Editions Les Arènes),  ces candidats manifestent leur désir à leur arrivée dans les rangs de Daech :
On pose la question aux combattants : « Voulez-vous être un combattant "classique" ou un combattant pour une opération kamikaze ? ». Ensuite, ces djihadistes suivent une sélection particulière car l’État islamique ne peut pas se permettre de voir au dernier moment un kamikaze flancher. Il y va de sa crédibilité.

  • Les futurs kamikazes seraient « mieux traités » par Daech
Les candidats aux opérations suicide sont placés dans une « katiba », un camp d’entraînement spécifique. Ils recevront, comme les autres combattants, une formation théologique et ils suivront un entraînement militaire. Mais ils seront mieux encadrés psychologiquement, expliquent plusieurs spécialistes.
Ces candidats aux attaques suicides seraient aussi plus respectés et mieux traités par les cadres de l’État islamique. C’est d’ailleurs peut-être aussi l’une des raisons qui motive ces djihadistes.
L’enquête sur les attentats du 13 novembre 2015 devra déterminer comment est né le projet d’attaque suicide à Paris et Saint-Denis. On sait déjà que la plupart des terroristes qui sont morts étaient passés par la Syrie. Il est fort probable qu’ils aient été soigneusement sélectionnés par Daech il y a plusieurs mois déjà.
(Un sujet d'Élodie Guéguen)

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